L’écologie, art du soin des relations
VitrineRencontres et sélection du 6 juillet au 20 septembre
— Résidence d’auteur de Marin Schaffner —
Un lien, un contact, un récit.
Nouer, interagir, narrer.
Tout cela est contenu dans relation, à la fois relier et relater.
Relatio dit le latin : « porter à nouveau » — par exemple la plume à l’encrier.
Il y a donc quelque chose d’un mouvement dans toute relation, qui est matière à penser. Mais est-ce seulement penser ? Car, en effet, comment définir une relation sans aussi la ressentir ? A la fois dans le corps et dans l’esprit, les relations nous enveloppent.
Elles sont co-constitutives, nous dit l’écologie : ce sont les relations qui nous façonnent, et sans elles aucun être vivant n’existe à proprement parler. De ce point de vue, toute vie est donc, plus précisément, une inter-existence. « Seul·e » n’existe pas dans ce monde. Et tout fantasme individuel s’efface bien vite devant la puissance des interdépendances.
Comme le disait l’éthologue suédois Jakob von Uexküll en 1934 : « Tout sujet tisse des relations comme autant de fils d’araignée avec certaines caractéristiques des choses, et les entrelace pour faire un réseau qui porte son existence. »
Depuis, ces principes fondateurs de l’écologie ont dérivé — comme les continents à la surface d’une planète Mer — et apporté leur lot de nouvelles représentations. Toute une constellation de nouvelles relations.
On pensera tout d’abord à l’écologie mentale de Félix Guattari1, ce soin éthique et politique apporté à toute forme de particularité (ce qu’on appelle généralement « folie ») pour essayer d’en tirer des chemins vers un accomplissement de soi (la « subjectivation », le devenir-sujet) et vers de nouveaux territoires existentiels.
Ce sont aussi les soubassements de l’écoféminisme, qui dès les années 1970, articulait les deux idées de reclaim et de care. Reclaim : à la fois revendiquer, se réapproprier et réparer ; le care, référence à la sollicitude et au soin dans leur sens le plus large (tout à la fois attention, responsabilité, prévenance, entraide, etc.). Derrière cela, une lutte pour la reprise en main des savoir-faire historiques de soin, féminins et populaires, dont les communautés humaines ont progressivement été privées par les enclos du système capitaliste — l’exploitation de la Terre et celle du corps des femmes relève d’une même nécropolitique, qui tue les relations.
Les représentations du monde autochtones et indigènes connaissent des enjeux comparables : elles ont été exterminées de façon systématique depuis des siècles, leur diversité s’est profondément amoindrie, mais des milliers de communautés aux quatre coins du globe sont encore là pour lutter et revendiquer des visions du monde alternatives. Ces cosmovisions sont profondément relationnelles — elles s’appuient sur l’idée que toutes les choses humaines et non-humaines, vivantes et non vivantes, sont reliées entre elles. Chaque milieu de vie est vu comme un tissu de relations, et la Terre dans son ensemble comme une entité vivante (Pachamama ou Gaïa). Ces visions du monde traditionnelles s’avèrent ainsi profondément écologiques et rejoignent les enjeux du soin de la Terre et de toute relation.
A la Chapelle, toutes ces problématiques s’entrecroisent. Microcosme multiculturel, périphérie intérieure d’une métropole, quartier populaire historique et haut-lieu de migrations, le quartier abrite un nombre considérable d’actes de soin : éducation, santé, hospitalité, culture, justice, écologie,… Avec la troisième thématique de cette résidence au Rideau rouge, nous essaierons donc de prendre soin de toutes celles et ceux qui prennent soin.
Car prendre soin est un art. Une pratique qui se fabrique, se transmet et s’invente — toujours collective. Une diversité de savoir-faire et de savoir-être. Un souci éthique pour le bien vivre qui implique d’être attentif aux relations. Par certains aspects, on pourrait même considérer qu’aucune écologie véritable (à la fois sociale et émancipatrice) ne pourra advenir sans cette éthique préalable : s’évertuer à prendre soin, c’est éviter de tout détruire.
1 Félix Guattari, Les Trois écologies, Galilée, 1989.
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Retrouver la bibliographie thématique dédiée proposée par Marin Schaffner, en résidence à la librairie le Rideau rouge.
La thématique « Soin des relations » sera également accompagnée de deux animations :
• La projection du documentaire Le Sous-bois des insensés le jeudi 16 juillet à 19h30 (en présence d’Emmanuelle Guattari, autrice de La Petite Borde) ;
• Et un atelier d’écriture collective sur les « cliniques sociales du futur » le samedi 5 septembre de 14h à 17h. Ouvert à toustes sur inscription (8 personnes maximum)
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